J'attendais toujours avec impatience les fêtes de Noël.
Autrefois,
pendant
une
période
appelée
l'Avent,
on
nous
incitait
déjà
à
préparer
avec
ferveur
cette
grande
fête
religieuse dite "fête carillonnée".
Chez nous, le soir de Noël, des hommes vigoureux venaient poser l'énorme bûche dans la grande cheminée.
Selon
le
rite
habituel,
le
maître
de
la
ferme,
répandait
sur
la
grosse
bûche
quelques
gouttes
d'eau
bénite
avec
un peu de sel.
La bûche devait "tenir" le feu pendant plusieurs jours.
Quand
elle
était
entièrement
consumée,
on
mettait
de
côté
quelques
charbons
afin
de
protéger
la
ferme
du
feu
et de l'orage pendant toute l'année.
Avec
la
bûche
enflammée,
la
joie
était
entrée
dans
la
grande
cuisine
où
l'on
préparait
à
réveillonner
avant
la
messe de minuit.
C'était
alors
la
traditionnelle
"soupe
grasse"
suivie
du
"bouilli"
(pot
au
feu)
que
l'on
retrouvait
encore
le
soir
du
premier de l'an.
Le
repas
se
prolongeait
avec
mes
frères
et
mes
sœurs
j'apprenais
à
chanter
les
Noëls
poitevins,
ces
vieux
Noëls,
la plupart abandonnés maintenant.
Quelle ne fut pas ma grande joie, lorsque pour la première fois, on m'autorisa à assister à la messe de minuit.
L'église était située à une lieue (4,8 km) de notre demeure.
Je partais avec ma famille, les yeux lourds de sommeil, dans la nuit noire et très froide.
Des voisins nous rejoignaient et les groupes se formaient.
Les
femmes
enveloppées
de
leur
grande
cape
de
laine,
parlaient
peu
et
suivaient
avec
peine
les
hommes,
coiffés
de
chapeaux
à
fond
aplati,
qui
faisait
claquer
leur
sabots
teintés
sur la terre gelée et qui pour la circonstance, portaient la blouse de cérémonie.
Au loin, s'envolait le carillon de Noël.
Dans
l'église
obscure,
éclairée
seulement
par
quelques
luminaires,
on
apercevait,
dans
nef,
toujours
à
la
même
place, la crèche peuplée de personnages sculptés par les gens des hameaux.
Avec les enfants de mon âge, je venais contempler le petit Jésus entouré Marie et de Joseph.
L'âne,
le
bœuf,
les
moutons
avec
leurs
bergers,
parmi
la
pierre
et
la
mousse,
au
milieu
des
branchages,
faisaient
notre administration.
Pendant
l'Office,
les
assistants
engourdis
dans
leurs
vêtements
attendaient
le
"Minuit
Chrétien"
chanté
par
le
"ténor" du village.
Mais
peu
à
peu,
nous
succombions
au
sommeil
et
déjà
la
ferveur
était
réduite
lorsque
commençaient
les
deux
autres messes basses auxquelles nous avions l'habitude d'assister.
Au retour de très modestes cadeaux nous attendaient dans les sabots placés devant la cheminée.
Il y avait aussi des pipes en sucre, des noix, des noisettes de la dernière récolte.
On nous servait un bol de lait chaud et nous allions nous coucher rapidement.
Autrefois, dans la joie de Noël, les fêtes de famille se prolongeaient plusieurs jours.
Les anciens attachaient également une grande importance à la température de ces journées.
Ils croyaient que le temps des premiers mois de l'année dépendait du temps des fêtes de Noël.
Cependant, de toutes les maximes, la plus simple et la plus vraie était sans doute
"Noël au balcon, Pâques au tison".
A la fin de l'année, deux autres journées étaient très attendues.
Celle du "Premier de l'An" qui permettaient les échanges de vœux entre parents et amis.
Nous les enfants, nous étions bien gâtés.
Nous recevions des gâteaux, des friandises et parfois des sous pour étrennes.
Et puis, quelques jours plus tard, les réjouissances de l'Epiphanie venaient terminer les fêtes de fêtes de Noël.
Jacques Maupillier (garde)