L'institution de la Table Ronde participe à l'exaltation de la figure du chevalier.
Comme
au
cours
d'un
festin,
une
violente
querelle
avait
opposé
ses
chevaliers
jaloux
de
leurs
préséances,
le
Roi
Arthur,
soucieux
de
régler
le
conflit,
fit
fabriquer
dit-on
une
immense
table
ronde
autour
de
laquelle
tous
pouvaient
se
réunir
dans
une parfaite égalité qui garantît la paix et la convivialité.
C'est
Wace
(1100–1175)
qui
le
premier
mentionne
dans
le
Roman
de
Brut
cette
table
conçue
pour
attirer
l'élite
des
chevaliers
sans
établir
de
hiérarchie
entre
eux,
et devenue le symbole de l'équilibre du Royaume.
D'après
Robert
de
Boron
(XIIIème
siècle),
cette
Table
serait
plutôt
une
initiative
de Merlin, fabriquée en souvenir de la table de la Cène du Christ.
Cette
version
tardive
manifeste
la
volonté
de
christianiser
le
mythe
ancien,
de
même que le chiffre récurrent de douze chevaliers.
Comme
les
douze
apôtres
du
Christ,
ils
se
trouvent
associés
au
drame
de
la
Passion
et au salut de l'Humanité.
Sur
chacun
des
sièges
de
la
table,
le
nom
du
chevalier
qui
y
a
pris
place
s'inscrit
miraculeusement en lettres d'or.
Un seul reste vide.
Le
"Siège
périlleux
"
ce
siège
vacant
(qui
est
tantôt
désigné
comme
celui
de
Judas,
tantôt comme celui du Christ) est réservé au "meilleur chevalier du monde".
C'est le pur et parfait Galaad qui sera désigné par le Ciel pour l'occuper.
Aussi
la
Table
Ronde
est-elle
restée
dans
l'imaginaire
collectif
comme
l'expression
la plus achevée de l'idéal chevaleresque.
A la Table Ronde s'associe étroitement le thème du Graal.
Ce
plat
long
et
creux
apparaît
pour
la
première
fois
dans
le
Perceval
de
Chrétien
de
Troyes, associé à une lance au bout de laquelle perlent des gouttes de sang.
Cet
objet
mystérieux,
qui
contient
une
hostie,
est
capable
de
combler
toutes
les
faims et de soigner tous les maux.
Par
la
suite,
Robert
de
Boron
l'assimile
à
la
coupe
dans
laquelle
Joseph
d'Arimathie aurait recueilli le sang du Christ crucifié.
Une
version
tardive
du
mythe
prétend
même
que
celui
qui
boit
dans
cette
coupe
accède à la vie éternelle.
Le
"Saint
Graal",
progressivement
devenu
ciboire
ou
calice
va
transformer
les
aventures chevaleresques en quête mystique.
Au
cours
du
XIIIème
siècle,
le
Cycle
du
Graal
va
rassembler
toutes
les
légendes
arthuriennes dans une perspective chrétienne.
Talisman
pourvu
de
pouvoirs
merveilleux
et
promis
aux
esprits
les
plus
purs,
le
Graal
suscite
dans
la
confrérie
de
la
Table
Ronde
une
quête
fervente
hissant
les
chevaliers à un haut degré de perfection spirituelle.
Elle trouvera son expression la plus parfaite avec Galaad.
C'est
en
effet
au
plus
jeune
et
au
plus
pur
des
chevaliers
qu'il
est
donné
de
toucher
le
Graal
et
de
regarder
à
l'intérieur
avant
de
rendre
l'esprit,
subjugué
par
la
beauté
de la vision.
La coupe est alors emportée au ciel par une main mystérieuse.
L'objet à jamais hors d'atteinte devient le symbole de l'inaccessible infiniment désirable.