Après avoir franchi les portes du château renaissance, nous faisons face à un magnifique escalier de granit siège une sculpture du collier de Saint Michel en référence au titre qu’avait François II du Puy du Fou. À cet instant, nous sommes face à une énigme… Que représente de collier ? Alors partons ensemble sur l’histoire de cette sculpture. À la veille de la guerre de Cent Ans (1337-1453), la féodalité avait depuis longtemps démontré ses limites. Par le jeu des serments multiples, on pouvait être vassal de plusieurs princes de guerre. En revanche, l’idéal chevaleresque, nourri par la littérature arthurienne, était encore très vivace. Aux XIIe et XIIIe siècle, le genre de vie et l’éthique du chevalier combattant à cheval chrétien, respectueux de la foi jurée et n’utilisant ses armes, bénies au cours de l’adoubement, que pour combattre le mal et l’injustice, étaient devenus ceux de toute la noblesse. Au début du XIVe siècle, l’état de chevalier était encore un modèle pour tous. Le 23 avril 1348, le jour de la Saint Georges, saint patron de l’Angleterre, le roi Édouard III (1312-1377) fonde l' "Ordre de la Jarretière". C’est le plus ancien ordre de chevalerie qui subsiste encore aujourd’hui et c’est l’un des ordres les plus fermés du monde avec depuis l’origine 25 titulaires plus le souverain, hors chefs d’État étrangers. En 1351, en réponse à la fondation de l’ordre de la Jarretière, Jean le Bon (1319 1364) créa l’ordre de la Noble Maison ou ordre de l’Etoile, qui devait rassembler autour du roi 500 chevaliers dévoués. Décimé sur les champs de bataille dès Poitiers (19 septembre 1356), l’Ordre tomba peu à peu en désuétude. Pour manifester son prestige et s’assurer l’allégeance de ses barons, qu’ils soient flamands, bourguignons ou autre, le duc de Bourgogne Philippe le Bon (1396-1467) fonde l’ordre de la Toison d’Or le 10 janvier 1430 à Bruges, à l’occasion de son mariage avec Isabelle de Portugal. Imité de l’ordre de la Jarretière, l’ordre est limité au début à 25 chevaliers. À la fin du XVe siècle (1401-1500), le roi de France Louis XI (1423-1483) cherche aussi à renforcer son pouvoir et à unifier son royaume. Dans cette optique, il décide de créer un nouvel ordre de chevalerie qui servirait à récompenser les membres de la noblesse les plus fidèles et dévoués à la couronne. C’est donc le 1er août 1469 à Amboise, que Louis XI institue officiellement l’Ordre de Saint-Michel, nommé ainsi en l’honneur de l’archange Saint-Michel, patron de la France. La devise de l’Ordre de Saint-Michel était : "Immensi tremor oceani", ce qui signifie en latin : "La crainte de l’immensité de l’océan". Cette devise évoque la puissance et la grandeur, symbolisant la force et la loyauté des chevaliers qui en étaient membres. Premier ordre de chevalerie institué par un monarque français, il vise à promouvoir les valeurs de piété, d’honneur et de service envers le roi et le royaume. Il s’agissait aussi d’un instrument de pouvoir royal visant à fidéliser l’élite du royaume autour de la couronne et symboliser la puissance et la gloire de la monarchie française. L’insigne est composé d’un collier, d’une croix d’or surmontée d’une couronne royale, au centre de laquelle figure l’image de l’archange Saint-Michel terrassant le démon. Les membres de l’Ordre portent fièrement les insignes de l’Ordre, tels que la croix de Saint-Michel suspendue à un ruban bleu azur. Lors des cérémonies, ils revêtaient également un manteau d’apparat richement décoré et participaient à des processions solennelles dans les cathédrales et les palais royaux. Ces signes de reconnaissance visaient à valoriser les membres de l’ordre et à les distinguer du reste de la noblesse. Lors de ces défilés imposants, ils rendaient hommage aux valeurs chevaleresques et à l’héritage de la noble institution. Dès sa création, l’Ordre acquiert un grand prestige et ne compte que 36 membres à vie. Cette restriction contribue à maintenir le prestige et l’exclusivité de cette distinction. L’admission au sein de l’Ordre était un processus très sélectif et rigoureux. Les candidats devaient faire l’objet d’une enquête approfondie sur leur lignée, leur réputation et leurs faits d’armes avant d’être proposés au roi pour intégrer l’Ordre. Les chevaliers et dignitaires de l’Ordre se réunissaient régulièrement dans les salles capitulaires des châteaux royaux pour discuter des affaires de l’institution. Ces assemblées privilégiées permettent de maintenir la cohésion, la fraternité et la discipline au sein de ce prestigieux groupe. En tant que conseillers privilégiés du roi, les chevaliers de l’Ordre de Saint-Michel exercent une influence politique importante, leur avis étant sollicité dans les décisions stratégiques du royaume. Les membres de l’Ordre jouissent également de privilèges fiscaux, notamment l’exemption de certains impôts et taxes, leur conférant un statut particulier au sein de l’élite du royaume. L’Ordre de Saint-Michel a progressivement rayonné bien au-delà des frontières de la France. L’Ordre a permis de constituer un vaste réseau de dignitaires, de nobles et de personnalités influentes dans toute l’Europe, nouant ainsi des liens diplomatiques et politiques cruciaux pour la Couronne française. Au fil des siècles, l’Ordre de Saint-Michel connaît des hauts et des bas, avec des périodes de stagnation et de renouveau, reflétant les évolutions politiques et sociales de la monarchie française. L’Ordre de Saint-Michel a connu un déclin progressif à partir du XVIe siècle (1501-1600), et après Henri II (1519-1559), l’ordre se dévalue devenant le "collier à toutes les bêtes" et Henri III (1574-1589) corrige le tir avec "L’ordre du Saint-Esprit". Excédé par les dérives de l’ordre de Saint-Michel, Louis XIV (1638-1715) le réforme en ramenant de plus d’un millier à cent le nombre de ses titulaires, obligatoirement nobles. Et pour la première fois, il réserve l’ordre à des personnes ayant démontré leurs mérites pendant au moins dix ans. Et le 5 avril 1693, à l’initiative de Vauban (1633-1707) et du maréchal de Luxembourg, le Roi-Soleil crée aussi une distinction destinée aux militaires. Appelée ordre de Saint-Louis, elle récompense les combattants selon leur vaillance et non selon leur naissance. Son succès va inspirer à Napoléon Bonaparte (1769-1821) la création de la Légion d'Honneur le 14 juillet 1804. La Révolution française a mis fin à tous les ordres de chevalerie en France, coupables d’instituer des inégalités entre les citoyens, à l’égal des institutions féodales. Bien que brièvement restauré au XIXe siècle par Louis XVIII (1755-1824) en 1816, l’Ordre de Saint-Michel a définitivement disparu en 1830.