Passant !
Lorsque tu chemines dans le pays du Puy du fou, ralentis ton pas.
Regarde autour de toi, regarde cette nature.
Nous, nous la contemplons avec respect.
Elle nous donnait tout.
La terre bien sûr, nous apportait le seigle, puis le labeur de l'homme faisait le pain.
Mais tant d'autres choses.
Sais-tu qu'au détour des chemins, la fleur jaune de la chélidoine ne nous échappait pas.
Le suc de sa gracieuse tige cueillie à l'été, soignait les verrues de génération en génération.
En
notre
temps,
il
y
avait
la
fête
aux
semailles
et
à
la
Saint-Jean
…
et
avec
la
joie
dans
les
cœurs,
mais
nous
traînions
aussi
avec
la
misère,
la
maladie…
et
point
de médecin, à la ville bien sûr, mais pour nous autres la bonne mère nature !
Que de fois ai-je vu les vieilles de chez nous "aller aux herbes", ramassant le tilleul, dans les grands carrés de lin, son infusion libérait de la fatigue du jour.
Et la valériane, "l'herbe aux chats" calmait le nerveux, si toutefois, il en supportait l'exécrable odeur.
Ah ! Oui, la nature nous donnait bien des remèdes quand l'oncle Jean de la borderie d'en bas fut pris d'entérite au printemps.
Je
revois
encore
la
tante
Zélie
préparant
dans
son
mortier
de
bois,
le
cataplasme
à
la
farine
de
lin,
mélangeant
l'huile
d'amande
douce
et
l'eau
de
vie…
et
il
fallait garder le cataplasme froid sur le ventre un jour durant et les prières aidant, l'oncle Jean fut des nôtres pour le moi de Marie.
Pour
l'entrée
de
l'hiver,
le
grand-père
nous
donnait
pour
nous
fortifier,
un
petit
verre
de
son
quinquina.
L'intendant,
lui
rapportait
l'écorce
de
chez
l'herboriste
à
la
ville
et
le
grand-père
la
laissait
macérer
dans une grande cruche avec un litre de "son" vin rouge.
Aux petits maux……les petits remèdes.
La fleur de bleuet en collyre quand les yeux étaient rouges aux battages.
La barbe de maïs en infusion.
L'armoise
et
sa
feuille
velue
qu'une
femme
honnête
n'aurait
pas
goûtée,
puisqu'on
la
disait
bonne
pour les avortements.
Oui ! La nature était bonne pour les pauvres.
Mais
qu'aurait-elle
pu
contre
la
typhoïde
qui
emporta
mon
pauvre
cousin
Henri,
ou
la
fluxion
de
poitrine
qui
terrassa
ma
sœur
cadette
malgré
les
enveloppements et les bains glacés qui lui prodigua ma grand-mère.
On soignait le mal par la mal !
La brulure par l'eau de vie, la fièvre par les bains d'eau chaude,….il fallait attirer le mal.
Et puis, il y avait toujours l'aide du Bon Dieu et l'on priait Saint Blaise pour les maux de gorge, Sainte Marguerite pour les douleurs de l'enfantement.
Et
le
curé
de
notre
paroisse,
le
pieux
homme,
nous
secourait
parfois
en
apportant
une
petite
fiole
de
"Baume
Tranquille"
qui
lui
fournissait
une
de
ses
parentes
de la ville.
Fabriqué
en
jetant
autant
de
crapauds
vifs
qu'il
y
a
de
livres
d'huile
et
en
mélangeant
le
tout
à
du
laudanum
(préparation
a
base
d'alcaloïdes
du
pavot
somnifère – vin d'opium) et au placenta d'un nouveau-né mâle d'une primipare (Femme ayant une première grossesse).
Ne disait-on pas que ce baume guérissait 17 maladies ?
Oui ! En passant regarde-la bien cette nature, elle a soulagé tant de nos misères !
Jacques Maupillier (garde)