Avant le spectacle, présentez-vous, Monsieur le "Marchand de Quenouille" ?
Je suis le galopin des routes, je cours au long des chemins et des sentiers.
J'erre
de
ferme
en
ferme
au
hasard
de
ma
fantaisie
et
j'apporte
dans
ma
besace les biens les plus précieux, l'amusement, le rêve, le vent d'ailleurs.
Après
ma
journée,
passée
à
courir
deux
ou
trois
paroisses,
je
suis
invité
à
la
veillée chez l'un ou l'autre.
Les femmes filent, les hommes tressent des paniers.
On casse des noix, on écosse des haricots et on m'écoute.
Je
dois
les
émerveiller
de
mes
légendes,
de
mes
récits
terrifiants
de
bêtes
fabuleuses.
Je leur conte aussi les nouvelles des autres villages, de la ville, même...
Quand
ils
sont
épuisés,
quand
leurs
yeux
se
ferment,
je
m'en
vais
dormir
dans la grange, roulé dans une couverture.
Le
lendemain,
à
l'aube,
après
une
bonne
soupe
de
potée,
un
morceau
de
lard
froid, je repars pour aller plus loin.
On
ne
me
revoit,
parfois,
que
de
longs
mois
plus
tard,
ayant
fait
le
tour
de
la
province.
Je
reviens
avec
les
histoires
et
les
nouvelles
que
j'ai
récoltées
dans
d'autres
veillées.
A
nouveau
les
yeux
qui
brillent,
à
nouveau
ils
oublient,
pour
un
temps,
la
banalité du quotidien.
Maintenant, je dois vous laisser.
Rejoignez
votre
place
en
tribune
le
spectacle
commence
dans
quelques
minutes.
*****
Les lumières se sont éteintes.
A
notre
droite,
une
petite
lumière,
une
ombre
qui
se
précise,
une
silhouette
qui arrive à grandes enjambées et qui va passer devant nous.
Une
large
cape
sombre
l'enveloppe
laissant
passer
seulement
les
jambes
que
l'on
devine
longues
dans
un
pantalon
noir
descendant
sur
des
sabots
usés
par les cailloux des chemins creux.
Il s'appuie sur un grand bâton et dans l'autre main, il tient un falot.
Malgré
la
chevelure
en
broussailles
délavée
par
les
intempéries
et
les
années,
on devine un profil grave et un regard profond.
Un feutre rétréci et cabossé lui couvre la tête.
La
silhouette
un
peu
courbée
suit
son
chemin,
s'arrêtant
pour
évaluer
la
distance
qui
lui
reste
à
parcourir
ou
pour
remettre
en
place
d'un
coup
d'épaule les quenouilles qui sortent du sac accroché sur son dos.
Ce "vieux cherche-pain" va arriver au village, il s'arrête, le public le regarde.
La
voix
de
Philipe
Noiret
est
grave,
envoûtante,
le
mystère
est
total
et
avec
ses
premiers
mots,
le
grand
livre
qu'est
"la
Cinéscénie"
ouvre
les
pages
de
l'histoire.
"Je n'ai jamais reçu de nom.
Ils m'appellent le vieux cherche-pain.
Je
traîne
mes
souvenirs
avec
mon
baluchon
humide
et
je
colporte
les
nouvelles de métairie en métairie..."